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Jusqu’au 25 novembre 2023 nous vous invitons à découvrir, au premier étage de la Bibliothèque, notre nouvelle exposition consacrée aux œuvres d’Élise Müller/Hélène Smith, une médium artiste genevoise. Retrouvez l’ensemble des articles sur Hélène Smith / Elise Müller en suivant ce lien.

La fille de Jaïrus, Hélène Smith, 3 août 1913-15 septembre
coll. LaM, Villeneuve d’Ascq.

Je pense que le mieux est de signer en toutes lettres «Élise Müller». Cette décision a mis du temps à se former dans l’esprit d’Hélène Smith, signer ses œuvres de son véritable nom. Elle l’écrit dans son journal en 1911, agacée d’entendre ce genre de choses: Ce n’est pas vous qui les faites ces tableaux puisque vous ne les signez pas? Ils ne vous appartiennent pas, puisque vous prétendez qu’ils vous sont en quelque sorte dictés?

Élise Müller elle-même, n’a pas de réponse définitive à cette question. En tant que médium, elle n’est pas la seule autrice de sa production narrative et visuelle. L’acte de création est largement partagé (multiples personnalités, esprits de passage, participant·es aux séances). C’est d’ailleurs ce qui rend son point de vue artistique si intéressant: montrer que sa voix est un collage et que la maîtrise est une illusion.

Pour que cette question émerge (Pourquoi je ne signerais pas?) il a fallu qu’Élise Müller devienne Hélène Smith, et qu’elle explore sa propre subjectivité en se servant de la transe médiumnique. Comme d’autres femmes de son époque, elle a fait de la médiumnité une stratégie d’émancipation. Car quand une médium parle, on l’écoute. À cette place, il devient possible d’exprimer son point de vue et de critiquer l’ordre des choses.

Cette expérience a fait pousser en elle une pensée réflexive et stimulé son gout pour la «recherche». Jusqu’à la fin de sa vie, Élise Müller s’est livrée à une étonnante auto-ethnographie, documentant minutieusement son expérience de voyante et de peintre. Est-elle parvenue, au terme de ce travail d’introspection, à se dire «ici, il y a une œuvre et l’autrice c’est moi»? Les traces qu’elle a laissées derrière elle sont insuffisantes pour l’affirmer, mais l’écriture de fiction nous permet de l’imaginer.

Smith, Hélène. Correspondance avec Théodore Flournoy.
Genève, 2 mars 1901-avril 1914,
Bibliothèque de Genève, Ms. fr. 8879/24

Références:

Flournoy Théodore, Étude sur un cas de somnambulisme: des Indes à la planète Mars: le cas Hélène Smith (1900), Réimpr. en facs avec une introduction de Serge Nicolas, Paris, L’Harmattan, 2006.

Deonna Waldemar, De la planète Mars en Terre Sainte : art et subconscient : une médium peintre : Hélène Smith, Paris, E. de Boccard, 1932.

Morehead Allisson, Le legs et l’exposition des tableaux d’Elise-Catherine Müller, dite Hélène Smith, au Musée d’art et d’histoire de Genève, 1929-1932, Genava, bulletin du Musée d’art et d’histoire, 49, 2001.

Demierre Carla (écriture et réalisation), Alloing Clara (montage et création sonore), Les archives perdues d’Elise Müller, «Pura vida», épisode 3, Grütli – centre de production et diffusion des arts vivants, juin 2022.

Demierre Carla, «La Nuit du phonographe», in Qui est là?, Lausanne, art&fiction, 2020.

Demierre Carla, «Hélène Smith», in Oracles Artist’s Calling Cards, dir. Pierre Leguillon with Barbara Fédier, Museum of Mistakes, Bruxelles, Head-Genève, éditions Patrick Frey, Zurich, 2017.

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