0041 22 418 28 00 communication.bge@ville-ge.ch
Sélectionner une page

La Saint-Barthélemy est un événement majeur de l’histoire européenne dont on commémore cette année les 450 ans. Le passage des familles protestantes fuyant à partir de 1572 les persécutions dont elles sont victimes en France a durablement marqué la mémoire genevoise. La Bibliothèque de Genève qui conserve de nombreux documents en relation avec l’histoire du protestantisme, a tenu à évoquer cette histoire en publiant une série de blogs. Elle a fait appel à divers spécialistes qui en illustreront de manière originale un événement, un thème ou un objet qui leur ont paru particulièrement significatifs.

François Dubois (Amiens, 1529-Genève, 1584): Massacre de la Saint-Barthélemy, vers 1575
Huile sur bois de noyer, 93,5 x 154,1 x 2,3 cm, Lausanne, MCBA, inv. 729

Conçu à la fois comme le témoignage d’une tragédie contemporaine et comme la représentation effroyable d’un martyre protestant, le tableau met en scène le massacre perpétré à Paris le 24 août 1572, jour de la Saint-Barthélemy. De gauche à droite, il montre la chapelle des Grands-Augustins (détruite), la Seine, le château du Louvre, devant lequel Catherine de Médicis semble maudire un tas de cadavres, ainsi que l’hôtel particulier d’Anne de Laval (144, rue de Béthisy), où est assassiné dans son lit l’un des chefs du parti protestant, l’amiral Gaspard de Coligny. Celui-ci, personnage principal du drame, est représenté plusieurs fois: d’abord défenestré, puis décapité et émasculé sur l’ordre de trois seigneurs (le duc de Guise, le duc d’Aumale et Henri d’Angoulême), enfin traîné dans la cour avant d’être pendu par les pieds au gibet de Montfaucon, sur la colline tout à droite.

L’auteur du tableau, le peintre amiénois François Dubois, a laissé sa signature sur la première marche de l’hôtel particulier: «franciscus Silvius Ambianus pinx[it]». Il pourrait bien avoir été un témoin oculaire du massacre. Dans son testament rédigé à Genève le 18 août 1584 six jours avant sa mort (survenue ironiquement à la Saint-Barthélemy!), il mentionne les noms de quelques proches, notamment le pasteur senlisien Simon Goulart, qui publie en 1576-1577 un recueil de témoignages relatant les mêmes événements. Quand et pour qui réalise-t-il ce tableau? Probablement autour de 1575 pour le théologien protestant Philippe Duplessis-Mornay, appelé le «pape des huguenots» et qui, d’après l’inventaire du château de Saumur (1619), possède une peinture avec «la mort de monsieur l’Amiral». Notons qu’une arrière-petite-fille de ce dernier, Catherine Gaudicher, épouse en 1685 Charles de Chandieu, bourgeois de Lausanne, et aurait pu offrir alors à cette ville le tableau, attesté dès 1686 dans l’Hôtel de ville et donné en 1862 par la municipalité au musée Arlaud, ancêtre de l’actuel MCBA.

Frédéric Elsig, professeur d’histoire de l’art à l’Université de Genève

Retrouver ici les autres billets de la série.

WP Twitter Auto Publish Powered By : XYZScripts.com

Pin It on Pinterest